« Ce projet de texte a une longue histoire. Il est d'abord né d'un besoin d'écriture sur un phénomène prégnant, la croyance, en prenant appui sur les discussions d'enfants de 5 ans au sujet de Dieu.
C'était en 2015 et cette année s'avérait marquée du sceau de la croyance, via les deux attentats de Charlie Hebdo et du Bataclan.
Croizades part d'un postulat tout à fait subjectif : je crois, donc je suis. Mes croyances, quelles qu'elles soient, fabriquent un appui, une colonne vertébrale psychique et physique à laquelle je m'agrippe plus ou moins fortement pour garder la tête droite. Plus cette colonne qui me soutient et me sous-tend est controversée, plus je m'agrippe fort, et plus je combats. Il n'est pas spécialement question de parler de religion ; plutôt d'enquêter sur les systèmes de valeurs, les communautés de corps et d'esprits qui nous permettent de tenir debout, et d'avancer, au sens littéral du terme.
La pièce se construit sous la forme d'une quadrilogie, écrite comme quatre variations sur un même thème : 1. Le temps de l'ignorance ; 2. L'hypothèse de la croyance ; 3. L'expérience de la foi ; 4. Aimer le diable. Une inspiration volontairement issue du vocabulaire religieux pour mieux s'en départir :
élargir le champ de la réflexion à l'économique, au social, au politique ». Sandrine Roche
Blanquette, la septième chèvre de Monsieur Seguin, se languit terriblement, enfermée dans l'enclos de son maître. Elle a soif de liberté. Elle veut voir la montagne. Elle veut voir le loup ! Il faut dire que le choeur des chèvres qui hante ses nuits pour lui dépeindre un loup séduisant et effrayant à la fois, un Seguin possessif, intraitable et froussard, rendent les pattes de la belle Blanquette incontrôlables.
Grâce à une langue rythmée et sonore, Sandrine Roche joue avec les mots pour livrer une version insolite de la célèbre nouvelle d'Alphonse Daudet, transformant toutes ces chèvres enfermées dans la cabanette du maître en he´roïnes révolutionnaires éprises de liberté.
Elle rompt la monotonie d'une pelouse bien entretenue ; déterminée, elle est même capable de s'insinuer dans un mur, perçant la roche... Qui ça ? La mauvaise herbe. Car il y aurait la bonne - qui, docile, marche droit - et la mauvaise - qui ne suit pas la route de la majorité. Mais souvent, ce n'est pas celle qu'on croit qui permet les changements. Sous les traits d'un conte médiéval, Sandrine Roche déploie un court texte à la puissance subversive réjouissante : une mystérieuse plante paraît et, une fois brûlée, met en joie les sujets d'un royaume à l'organisation bien rodée, cadenassée et hiérarchisée.
Dans une société qui tend à se refermer sur elle-même, qui sacrifie la liberté de circulation, et bientôt de penser, sur l'autel d'une prétendue sécurité, ce texte rappelle que la chape de plomb peut être fissurée, voire brisée, en retrouvant la joie de l'action collective. Ode à l'émancipation et à la liberté, La Vie des bord(e)s enchante aussi par l'inventivité de sa langue musicale, truffée d'incises et de mots venus d'ailleurs.
Voici un texte matériau qui se partagera d'un-e interprète à de nombreux-ses joueur-se-s.
Que se racontent des petites gymnastes lors d'un entraînement ? Des histoires de gymnastes ? Des histoires de petites filles ? Pas vraiment. Ou plutôt si, mais pas comme nous l'entendons nous, adultes. Car entre deux rondades et trois portés, on observe combien ces demoiselles sont des éponges du monde des grands. Et qu'elles répercutent avec leurs mots à elles les abjections, les médisances, les perversions sexuelles ou non qu'on émet d'habitude à voix basse, dans une autre pièce, estimant, à tort, qu'on ne nous entend pas.
Avec une langue épurée, comme taillée au cutter, Sandrine Roche propose un matériau rare, un univers très personnel, qui prend en compte dans le texte même les corps et les sensations.
Ces deux textes sont les derniers volets de la trilogie Ma Langue !, après Reducto absurdum de toute expérience humaine (2005), un cycle dédié à la famille au sens large et à la mécanique sociolinguistique.
Feutrine est le conte d'une famille soucieuse de construire un monde « chaleureux et apaisant » dans lequel la circulation des sujets et des biens est soumise au contrôle des dominants. Dans une ville nouvelle en construction, l'ascension vers le 5 e et dernier étage d'un immeuble est devenue synonyme de réussite. En contrepoint, une des filles de la famille creuse lentement de ses mains une galerie souterraine pour échapper à la normalité obligatoire dans laquelle on tente de l'enfermer. Allégorie politique, Feutrine est avant tout une réflexion sur la liberté créatrice actuelle.
DISTRIBUTION : une famille de 10 individus - jouable par 4 acteurs / GENRE : drame intime.
Un silence idéal est un jeu. Cinq personnes sont réunies pour reconstituer l'histoire d'une famille qui semble se déchirer sur la ques- tion de l'élevage intensif du cochon. Le point de départ de la reconstitution est le meurtre inattendu d'un des trois frères lors d'une tentative de conciliation. On décide alors de « rétablir la vérité des faits », mais le jeu dérape et va bien plus loin.
DISTRIBUTION : 3 femmes / 6 hommes / 1 enfant - jouable par 5 acteurs / GENRE : drame intime.
Des cow-boys s'amuse à transposer dans notre société les codes du western : violence, domination et alliances tournantes. Une bande d'enfants, un groupe d'adolescents et un quatuor d'adultes jouent à cette loi du plus fort. Un texte explosif sur les rapports de pouvoir aujourd'hui. Mon rouge aux joues donne la parole aux trois femmes du Petit Chaperon Rouge. En trois monologues croisés, l'enfant, la mère et la grand-mère évoquent les hontes, les peurs, les colères et les désirs transmis d'une génération à l'autre.
Un texte sur l'héritage de la féminité, les relations mères-filles et la soif de liberté. Jouant avec les formes, les corps et les rythmes, Sandrine Roche invente un théâtre tellurique, et offre ainsi de magnifiques partitions de jeu.