Les 10 livres que Mailys de Kerangal emporterait sur une île déserte (rencontre AOC/Fondation Ricard du 9 février 2021)
On accède au monde souterrain par le tronc fendu d'un vieux frêne...
« Underland », c'est le monde d'en bas, les lieux où hommes et femmes enfouissent leurs secrets honteux ou merveilleux.
Pendant plus de sept ans, l'écrivain Robert Macfarlane a visité des sites souterrains : un laboratoire caché dans une mine de sel sous la mer, des grottes norvégiennes abritant des peintures rupestres mystérieuses, les profondeurs de glaciers d'où surgissent des icebergs monstrueux.
Tout ce que nous entreposons, cachons, jetons, laissera une empreinte dans la terre. Quel sera notre legs géologique aux générations futures ?
En explorant notre rapport au sous-sol, Robert Macfarlane nous transmet un savoir riche, poétique et précieux.
Mêlant littérature, science et récit de voyage, Underland est une odyssée puissante qui résonne longtemps après qu'on en a achevé la lecture.
« Ô Muse, conte-moi l'aventure de l'Inventif :
Celui qui pilla Troie, qui pendant des années erra.
Voyant beaucoup de villes, découvrant beaucoup d'usages.
Souffrant beaucoup d'angoisse dans son âme sur la mer.
Pour défendre sa vie et le retour de ses marins.
Sans en pouvoir sauver un seul, quoi qu'il en eût :
Par leur propre fureur ils furent perdus en effet.
Ces enfants qui touchèrent aux troupeaux du dieu d'En-Haut.
Le Soleil qui leur prit le bonheur du retour ...
À nous aussi, Fille de Zeus, conte un peu ces exploits ! ».
Ainsi s'ouvre le premier des vingt-quatre chants de L'Odyssée - mais faut-il présenter ce « très vieux poème » ? La superbe traduction (en vers) de Philippe Jaccottet fait revivre l'épopée d'Homère, qui vient « à son lecteur ou, mieux peut-être, à son auditeur un peu comme viennent à la rencontre du voyageur ces statues ou ces colonnes lumineuses dans l'air cristallin de la Grèce... ». D'après la tradition antique, Homère, l'aède aveugle, aurait vécu au IXe siècle avant J.-C. et serait l'auteur de cette épopée universellement connue, composée après L'Iliade.
Cette traduction de référence est accompagnée, pour cette édition grand format, de pastels originaux de Julien Chabot. Elle est complétée par le bel essai de l'historien François Hartog, Des lieux et des hommes, qui parcourt l'espace géographique et maritime, mental et poétique du monde d'Ulysse.
La nuit du Nouvel An, dans un petit village anglais où tout le monde se connaît, une adolescente disparaît. Les habitants se lancent à sa recherche, bientôt rejoints par les journalistes et la police. Au fil des semaines, les chances de la retrouver s'amenuisent. La vie finit progressivement par reprendre son cours. Mais le retour au calme est-il possible quand le souvenir de la jeune fille persiste dans les mémoires et les paysages ?
Réservoir 13 est la chronique minutieuse et virtuose, pendant les treize années qui suivent le drame, de ce village au quotidien rythmé par les saisons et la nature alentour.
Charles Reznikoff (1894-1976) était avec Carl Rakosi, George Oppen et Louis Zukofsky un des quatre poètes du courant dit 'objectiviste' américain, qui commencèrent à publier, de manière confidentielle, dans les années vingt du siècle dernier. De Charles Reznikoff ont été publiés en France, Témoignage, Les États-Unis, 1885-1890, un fragment du présent volume (Hachette/P.O.L, 1981, traduction par Jacques Roubaud), aujourd'hui épuisé ; Le Musicien, roman (P.O.L, 1986, traduction par Emmanuel Hocquard et Claude Richard) ; Holocauste (Prétexte, 2007, traduction Jean-Paul Auxeméry).
Dans un entretien publié dans Contemporary Literature Charles Reznikoff, pour décrire sa démarche, citait un poète chinois du XIe siècle qui disait : 'La poésie présente l'objet afin de susciter la sensation. Elle doit être très précise sur l'objet et réticente sur l'émotion'. Sans doute n'est-il pas inutile, aujourd'hui, de présenter avec Témoignage, Les États-Unis (1885-1915) une des illustrations les plus complètes et convaincantes de ce programme.
Témoignage, Les États-Unis (1885-1915) est une vaste fresque pour décrire l'entrée des États-Unis dans l'ère moderne à travers la restitution minutieuse et la mise en forme de rapports d'audience de tribunaux amenés à juger aussi bien de conflits de voisinage ou de succession que d'accidents du travail ou de faits divers atroces. Son édition poursuit le travail entamé en 1981 avec la publication de Témoignage, Les États-Unis, 1885-1890 et du Musicien.
Journaliste biélorusse, l'auteure a enquêté durant trois ans. Elle a interrogé les hommes et les femmes de Tchernobyl et retranscrit leurs témoignages sur leurs sentiments, leur souffrance, leur état d'esprit et leur vision de la vie après l'accident. Il en résulte un livre où résonnent les voix des suppliciés de la catastrophe nucléaire.
«La photo en noir et blanc d'une petite fille en maillot de bain foncé, sur une plage de galets. En fond, des falaises. Elle est assise sur un rocher plat, ses jambes robustes étendues bien droites devant elle, les bras en appui sur le rocher, les yeux fermés, la tête légèrement penchée, souriant. Une épaisse natte brune ramenée par-devant, l'autre laissée dans le dos. Tout révèle le désir de poser comme les stars dans Cinémonde ou la publicité d'Ambre Solaire, d'échapper à son corps humiliant et sans importance de petite fille. Les cuisses, plus claires, ainsi que le haut des bras, dessinent la forme d'une robe et indiquent le caractère exceptionnel, pour cette enfant, d'un séjour ou d'une sortie à la mer. La plage est déserte. Au dos : août 1949, Sotteville-sur-Mer.» Au travers de photos et de souvenirs laissés par les événements, les mots et les choses, Annie Ernaux donne à ressentir le passage des années, de l'après-guerre à aujourd'hui. En même temps, elle inscrit l'existence dans une forme nouvelle d'autobiographie, impersonnelle et collective.
Une journée dans la vie d'une femme. Vivant dans la haute société anglaise, au lendemain de la Première Guerre mondiale, l'héroïne s'interroge sur ses choix - pourquoi n'a-t-elle pas épousé l'homme qu'elle aimait vraiment, qui lui rend visite ce jour-là? -, ses souvenirs, ses angoisses - pourquoi est-elle si frappée par la mort d'un ancien militaire qui ne s'est pas remis de la guerre, pourtant un parfait inconnu pour elle? Crise existentielle qui mène à un dédoublement de personnalité, aux portes de la folie. Ce grand monologue intérieur exprime la difficulté de relier soi et les autres, le présent et le passé, le langage et le silence, mais aussi de se reconnaître soi-même. Comment s'émanciper du carcan social, comment assumer son identité? Publié en 1925, Mrs Dalloway est le chef-d'oeuvre de Woolf et l'un des piliers de la littérature du XX? siècle. Dans ce roman poétique, porté par la musique d'une phrase chantante et d'une narration incisive, les impressions deviennent des aventures.
Le Narrateur se souvient de l'enfant qu'il fut. L'attente du baiser maternel du soir, les déjeuners du dimanche chez tante Léonie, les cadeaux de la grand-mère. Il est fasciné par M. Swann, un ami de ses parents, amoureux fou d'une femme qui aime tout le monde sauf lui. Il tombe amoureux de sa fille, Gilberte, qui ne le rendra pas plus heureux. A travers ces scènes de vies - intimes ou mondaines, tragiques ou comiques - passent des impressions, des parfums, des visions. Des nymphéas à la surface d'une rivière, une madeleine oubliée dans une tasse de thé, des catleyas dans les cheveux d'une femme aimée, une bille d'agate offerte en gage d'amitié... Mais, une fois adulte, comment demeurer cet enfant émerveillé dans un monde que l'on ne reconnait plus, où l'amour est souffrance, où le désir est jalousie, où «le souvenir d'une certaine image n'est que le regret d'un certain instant» ? Réminiscences de l'enfance perdue, roman d'amour impossible, satire de la haute société emprisonnée dans l'éphémère de la mode, mais aussi étude philosophique sur la mémoire involontaire : Du côté de chez Swann est tout cela à la fois.Qu'est-ce qu'un chef-d'oeuvre ? Un palais du souvenir, aux mille portes d'entrée, où chaque lecteur éprouve une émotion singulière, toujours renouvelée.
S'abîmer Absence Adorable Affirmation Altération Angoisse Annulation Ascèse Atopos Attente Cacher Casés Catastrophe Circonscrire Coeur Comblement Compassion Comprendre Conduite Connivence Contacts Contingences Corps Déclaration Dédicace Démons Dépendance Dépense Déréalité Drame Écorché Écrire Errance Étreinte Exil Fâcheux Fading Fautes Fête Fou Gêne Gradiva Habit Identification Image Inconnaissable Induction Informateur Insupportable Issues Jalousie Je-t-aime Langueur Lettre Loquèle Magie Monstrueux Mutisme Nuages Nuit Objets Obscène Pleurer Potin Pourquoi Ravissement Regretté Rencontre Retentissement Réveil Scène Seul Signes Souvenir Suicide Tel Tendresse Union Vérité Vouloir-saisir
Cortège [...] Un jour Un jour je m'attendais moi-même Je me disais Guillaume il est temps que tu viennes Pour que je sache enfin celui-là que je suis Moi qui connais les autres Je les connais par les cinq sens et quelques autres Il me suffit de voir leurs pieds pour pouvoir refaire ces gens à milliers De voir leurs pieds paniques un seul de leurs cheveux Ou leur langue quand il me plaît de faire le médecin Ou leurs enfants quand il me plaît de faire le prophète Les vaisseaux des armateurs la plume de mes confrères La monnaie des aveugles les mains des muets Ou bien encore à cause du vocabulaire et non de l'écriture Une lettre écrite par ceux qui ont plus de vingt ans Il me suffit de sentir l'odeur de leurs églises L'odeur des fleuves dans leurs villes Le parfum des fleurs dans les jardins publics O Corneille Agrippa l'odeur d'un petit chien m'eût suffi Pour décrire exactement tes concitoyens de Cologne Leurs rois-mages et la ribambelle ursuline Qui t'inspirait l'erreur touchant toutes les femmes Il me suffit de goûter la saveur du laurier qu'on cultive pour que j'aime ou que je bafoue Et de toucher les vêtements Pour ne pas douter si l'on est frileux ou non O gens que je connais Il me suffit d'entendre le bruit de leurs pas Pour pouvoir indiquer à jamais la direction qu'ils ont prise Il me suffit de tous ceux-là pour me croire le droit De ressusciter les autres Un jour je m'attendais moi-même Je me disais Guillaume il est temps que tu viennes [...]